« Vayakhel », la
section de la semaine qui continue à traiter de la construction du Tabernacle,
rend, comme nous le verrons, un hommage aux femmes. Le 8 mars étant la journée
de la femme, je souhaite leur dédier cette étude et commenter les quelques
versets de cette section qui leur rend hommage.
Lisons le texte
Chap.35, V. 22 à 27 : « les
hommes vinrent avec les femmes ; tout homme généreux de cœur apporta des
bracelets, des boucles, des anneaux, des ornements, toutes sortes d’objets en
or et tout homme qui avait levé une offrande d’or pour Hachem. Et tout homme se
trouvant en possession de laine azur, pourpre et écarlate, de lin et de poil de
chèvre, de peaux de béliers teintes en rouge et de peaux de ta’hach les
apporta. Quiconque avait prélevé un prélèvement d’argent et de cuivre, apporta
le prélèvement pour Hachem ; et tout homme se trouvant en possession de
bois d’acacia pour tout travail de l’ouvrage, l’apporta. Et toute femme sage de
cœur fila de ses mains ; et elles apportèrent, tout filés, la laine azur,
pourpre et écarlate et le lin. Et toutes les femmes que leur cœur portait à la
sagesse filèrent le poil de chèvre. »
La Thora rend hommage aux femmes
Pour Rachi, la formule employée
au début du verset (les hommes vinrent avec les femmes) tend à faire ressortir
que les femmes se montrèrent plus empressées que les hommes à offrir leur plus
belle parure en l’honneur du sanctuaire.
Le Rav Munk nous enseigne qu’« à
l’occasion de l’érection du veau d’or ce furent les hommes qui se dépouillèrent
de leurs pendants d’or, alors que les femmes se refusèrent de lui apporter
leurs dons. »
Rabbi Éliezer ajoute que grâce à
cela, « elles furent récompensées, en ce monde et au monde futur, de
la fidélité à Dieu qu’elles manifestèrent en ces deux circonstances. »
Selon le Ramban, : « les
hommes ont joué un rôle de second plan par rapport aux femmes. Les bijoux
énumérés dans ces versets sont surtout portés par des femmes. La Torah leur
rend donc hommage car, dès qu’elles ont entendu l’appel de Moïse, elles se sont
dépouillées de leurs biens les plus précieux et les ont immédiatement
apportés. »
Nous lisons « toute femme
sage de cœur » « hahamat lev ». Maïmonide traduit « sage de
cœur » par « femme artiste ». Au dernier chapitre du Guide des Egarés,
le Rambam analyse les quatre sens dans lesquels s’emploie le mot
« hahama » dans la langue hébraïque. Pour lui, le mot dans ce verset
fait partie du second sens, c’est-à-dire : « au second sens, ce
terme se dit de la possession d’un art quelconque. »
Le Rav Munk complimente les
femmes lorsqu’il commente « Et toutes les femmes que leur cœur
portait à la sagesse filèrent le poil de chèvre. » pour
lui, « cette formule, fait remarquer le Talmud Sabbat 99a, implique
une possession de l’art plus parfaite que celle qui était sous-entendue au
verset précédent. Là, il ne s’agissait que de filer la laine ou le lin pour les
tentures d’étoffe qui constituaient l’enveloppe inférieure du Tabernacle. Ici,
le texte a en vue la confection de l’enveloppe supérieure, composée de tapis en
poil de chèvre. Or, ce poil devait être filé, comme Rachi le rapporte,
« pendant qu’il était encore sur le dos de la chèvre ». Cette opération
exige, certes, un talent supérieur comme le Talmud Sabbat 74a le note
expressément. Elle était cependant nécessaire afin de préserver l’enveloppe sacrée
de toute impureté lévitique. »
Il est regrettable qu’au fil du temps le mot « exemption » soit devenu « interdiction ».
Maintenant que nous savons que la Torah rend quelquefois
hommage aux femmes, essayons de voir quel rôle le judaïsme leur réserve ?
Traditionnellement, les femmes, dont le rôle était de
s’occuper de leur foyer et des enfants, étaient exemptées de mitsvot positives
car ces dernières demandent du temps comme par exemple, assister à certains
offices.
Il est regrettable qu’au fil du temps le mot
« exemption » soit devenu « interdiction ».
Nous observons, dans le monde orthodoxe, que les rabbins
sont tous des hommes ; que les femmes ne peuvent compter pour le mynian
(dix personnes pour prier) ; que les femmes ne sont pas autorisées à
monter à la Torah ; elles ne peuvent pas réciter le Kaddish (la prière des
morts) ; elles ne sont pas autorisées à revêtir un châle de prière….
Nous savons que cette discrimination n’était pas fondée sur
une supposée infériorité intellectuelle des femmes, mais qu’au contraire
beaucoup de rabbins considéraient que les femmes avaient davantage d’intuition
que les hommes. Alors pourquoi cette ségrégation ?
La réponse est simple, la natalité. Dans les anciens temps,
les familles juives avaient de nombreux enfants, et, comme dans toutes les
sociétés, les femmes s’occupaient exclusivement de la maison et des enfants.
Ainsi, elles n’avaient pas le temps d’étudier.
Le XXe siècle, avec toutes ses modifications technologiques,
sociologiques, économiques a modifié le rôle des femmes dans la société. Des
femmes sont devenues premier ministre, chef d’entreprise, professeur… Ainsi, elles
sont devenues l’égal de l’homme. Nous devons donc abroger la discrimination car
il n’existe aucune injonction particulière interdisant aux femmes de pratiquer
les mitsvot positives.
Dans les mouvements libéraux qui sont empreints de
féminisme, on cultive une plus grande égalité entre hommes et femmes. Ainsi,
des femmes ont obtenu, à partir de 1972, le titre de rabbin et la fonction de
hazan (chantre). Cependant ils ne nient pas l’importance des textes sacrés et
continuent à les étudier.
A l’heure où j’écris ce commentaire, deux faits d’actualité
montrent que nous sommes à la croisée des chemins.
Au Royaume-Uni, Les ultra-orthodoxes juifs ont
récidivé. L'année dernière, ils avaient interdit aux femmes de
conduire leurs enfants à l'école en voiture, précisant que dans une telle
situation, "aucun écolier ne serait admis" au sein de l'établissement.
Cette année, ils ont tout simplement effacé les femmes qui apparaissaient dans
les livres scolaires, les élèves avaient
même l'interdiction d'adresser la parole aux inspectrices de sexe féminin.
"La majorité des élèves expriment des opinions sur les
rôles des femmes et des hommes qui indiquent que l'école ne les prépare pas à
la réalité de la vie dans la société britannique moderne", a déclaré
l'inspection académique. "Les élèves considèrent unanimement que le rôle
des femmes est de s'occuper des enfants, de nettoyer la maison et de cuisiner
tandis que les hommes vont travailler".
L’espoir vient peut-être d’Israël où hommes et femmes
pourront désormais prier ensemble devant le Mur des lamentations : le
gouvernement israélien a en effet décidé d'y créer un troisième espace, mixte,
dans le prolongement des espaces hommes et femmes.
En guise conclusion, je propose à tous les hommes de méditer
la phrase de Stendhal : "L'admission
des femmes à l'égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la
civilisation, et elle doublerait les forces intellectuelles du genre
humain."
Eric Gozlan
egozlan.blogpost.fr
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire